A la mort de Me Shimizu (1978), la Fédération internationale de Jôdô (IJF) qu’il avait fondée avec Me Donn F. Draeger se retrouva isolée. Comme la situation au Japon était peu claire du fait que Me Shimizu n’avait pas nommé de successeur, la génération d’enseignants formés par ce dernier ne pouvant se mettre d’accord, chacun poursuivant ses activités de son côté, sans concertation et même, dans certains cas, avec des rivalités, l’IJF ne fut guère encouragée à renouer des contacts avec le Japon. Le choix d’une personne en particulier était difficile et aurait créé plus de rivalités encore.
Me Donn F. Draeger, responsable de l’IJF dès 1978 avec Quintin T. Chambers et Phil Relnick, décida donc de garder ses distances. Son charisme et son intégrité suffisaient à donner à la Fédération une image solide et crédible. Malheureusement, ce dernier nous quitta en 1982, atteint d’un cancer aux intestins. Dès lors, les cinq responsables de l’IJF (Phil Relnick, USA, Président, Quintin T. Chambers, Hawaii, Commission technique, Pascal Krieger, Europe, Premier Vice-président, Karunakaran, Sud-est asiatique, Second Vice-président, et Paul Maloney, Australie, Secrétaire) continuèrent, tant bien que mal, le travail de Me Draeger. Par manque de maturité technique surtout, ainsi que du fait de l’absence d’une autorité unique, la situation menaçait de se dégrader.
Me Donn F. Draeger écoute l'enseignement de Me Takaji Shimizu
C’est dans ce contexte que vint s’insérer tout naturellement la visite de Me Nishioka. Invité comme Conseiller technique au 6e Stage international de Jôdô de Hawaii en 1994, Me Nishioka Tsuneo sut s’attirer la sympathie de tous. Un des premiers élèves de Me Shimizu, Me Nishioka avait préservé une facette de l’enseignement de Me Shimizu que nous ne connaissions pas. Le rôle de Uchidachi (le côté sabre) y retrouve un sens qui s’était quelque peu perdu, une position plus de côté pour le Jô, et un accent particulier sur le Ma-ai (distance) et le timing (Ri-ai) donnent à son style une cohérence que nombre d’entre nous recherchaient inconsciemment.
Encouragé par notre enthousiasme, Me Nishioka assura un suivi technique dans les années qui suivirent cette rencontre inespérée. Il se rendit plusieurs fois en Europe, en Australie, en Malaisie et aux Etats-Unis pour des périodes plus ou moins longues afin de parfaire son enseignement principalement auprès des responsables régionaux. Ayant déjà formé 8 Menkyo Kaiden au Japon, Me Nishioka remit ses deux derniers Menkyo Kaiden à Phil Relnick et Pascal Krieger.
C’est un nouveau départ pour l’IJF qui se sent ainsi légitimée et plus sûre d’elle-même. La participation de Me Nishioka au développement de l’IJF a également favorisé une progression remarquable du nombre d’adhérents à l’IJF. Il a notamment contribué à introduire le Jô en Amérique du Sud.
Loin de vouloir s'imiscer dans les affaires de l’IJF, Nishioka Sensei est très strict quant à sa position: il conseille techniquement mais laisse à la Commission technique de l’IJF l’entière responsabilité du développement de la Fédération, ainsi que sa gestion tant sur le plan technique que sur le plan administratif. Finalement, il est à noter que Me Nishioka a fait un travail énorme ces 10 dernières années d’une manière totalement désintéressée, payant de sa poche ses nombreux voyages et n’acceptant aucune rémunération en espèces. L’IJF lui en est extrêmement reconnaissante et fera tout son possible pour qu’il reste fier de s’être si généreusement impliqué.